Drogues : la pénalisation de l’usage inefficace pour deux-tiers des Français
Les deux tiers des Français jugent la pénalisation de l’usage des drogues inefficace pour lutter pour la consommation (66%) et les trafics (69%), selon un sondage CSA publié jeudi 21 janvier par plusieurs associations.
À lire aussi :Un livreur de drogue à domicile tombe en panne et se fait interpeller
Les trois-quarts (73%) d’entre eux estiment par ailleurs insuffisantes les campagnes de prévention de l’État et 82% se disent favorables à un débat public sur le sujet, ajoute cette enquête commandée par le Collectif pour une nouvelle politique des drogues à l’occasion des 50 ans de la loi de 1970, qui fixe le cadre législatif en vigueur en la matière. Fondée sur la «répression et la prohibition», la loi ne «fait pas baisser le nombre de consommateurs et les trafics», a souligné jeudi devant la presse Jean-Maxence Granier, de l’association d’usagers ASUD. De plus, elle «produit des discriminations raciales, sociales, et une défiance d’une partie de la population» envers les forces de l’ordre: celle des quartiers populaires, abondamment ciblée par les contrôles de police pour usage et/ou trafic de stupéfiants, selon le Collectif.
Pour Bénédicte Desforges, du collectif Police contre la Prohibition, la loi actuelle est inefficace car elle sert seulement «la politique du chiffre». Elle entraîne de surcroît «un engagement démesuré des effectifs» de police, détournés de leur mission principale puisqu’ils «courent après les fumeurs de cannabis au lieu de se consacrer à lutter contre les trafics». Ce constat s’impose encore plus, selon elle, depuis la généralisation début septembre de l’amende forfaitaire de 200 euros pour usage de drogues, dont le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a fait une mesure phare de son dispositif de lutte contre les stupéfiants.
170.000 personnes sont interpellées chaque année pour usage de stupéfiants et «100 à 150 personnes» sont actuellement incarcérées pour ce motif, a pour sa part rappelé Katia Dubreuil, du Syndicat de la magistrature. D’après Catherine Delorme, de Fédération Addiction, la politique publique actuelle, en consacrant «plus de moyens à la répression qu’à la prévention», empêche tout travail visant à ce que les consommateurs de drogues en aient un usage maîtrisé et non problématique. Le sondage a été réalisé du 8 au 10 décembre auprès de 1007 Français représentatifs de la population française âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas. La moitié de l’échantillon a été exposée à de l’information sur les drogues avant d’y répondre, l’autre moitié non.